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MESSAGE PASCAL DE L’AN DE GRACE 2024

« Ressuscité du tombeau comme il l’avait prédit,

Jésus nous donne l’éternelle vie et la grâce du salut. »

(Synaxaire des Matines de Pâques)

CHRIST EST RESSUSCITE !

« Jour de la Résurrection ! Peuples rayonnons de joie : c’est la Pâque, la Pâque du Seigneur ! De la mort à la vie, de la terre jusqu’au ciel ! le Christ, notre Dieu, nous conduit : chantons la victoire du Seigneur ! » ( Matines de Pâques, Ode 1 / Irmos). 

 Comprenons que ce jour de la Résurrection est l’aujourd’hui de Dieu qui ne connaît pas de soir. C’est un jour sans déclin par lequel le Fils de Dieu ressuscité atteint par sa lumière ce qui est éternel en nous : notre propre mystère personnel. Vivre ce jour, c’est vivre l’amour qui est Dieu. Nous l’imaginions loin de nous et voici qu’en se livrant à nous, il nous saisit jusque dans la profondeur de notre propre mort. Il nous attire à lui et il nous révèle ainsi que notre vie, à chaque instant, n’a de sens que si elle est animée par la sienne, par son amour.

« O Mort, s’écrie Saint Jean Chrysostome dans sa célèbre homélie de Pâques, où est ton aiguillon ? Enfer, où est ta victoire ? Le Christ est ressuscité et tu es terrassé. Le Christ est ressuscité et les démons sont tombés. Le Christ est ressuscité et les Anges sont dans la joie. Le Christ est ressuscité et voici que règne la vie et il n’est plus de mort au tombeau. Car le Christ est ressuscité des morts, prémices de ceux qui se sont endormis… »

Je viens de vous dire que le jour de la Résurrection est l’aujourd’hui de Dieu qui ne connait pas de soir. Nos Saints, par l’exemple de leur vie, nous enseignent en effet qu’il n’y a pas de séparation entre « la vie présente et la vie future » parce que le présent et le futur sont ensemble « le présent de Dieu ». La raison nous montre « ce qui est déjà » ; la foi véritable « ce qui sera ou le pas encore » qui viendra. Heureux celui qui fait exister en lui ces deux réalités. Heureux celui qui peut affirmer sans hésitation qu’il a vu la Résurrection du Christ non pas avec les yeux de son corps mais avec les yeux de son cœur, avec les yeux de l’intérieur de tout son être, contrairement à celui qui est dans l’attente de voir se réaliser cette résurrection, dans l’attente de constater que ce grand et unique jour est réellement arrivé.

Incontestablement, l’homme d’aujourd’hui pressant le mystère malgré une société où tout s’échange, se monnaie, se banalise. Il pressant le mystère malgré un monde gangrené par la violence, par des violences extrêmes, des violences hors normes, en passant par la destruction en masse de populations civiles, non directement impliquées dans des tueries comme c’est le cas en Ukraine ou en Palestine. Par des violences qui cherchent à tuer l’humain en l’homme ; à défaire l’autre, à l’avilir ; pas seulement à l’exploiter, pas seulement à l’exclure mais tout simplement à l’éradiquer. 

Et encore, non loin de nos portes l’heure aujourd’hui n’est plus à la paix mais à la guerre ; elle n’est plus à l’abolition des frontières mais au nationalisme pur et dur ; elle n’est plus aux belles constructions juridiques mais au rapport de force les plus crues et à la montée des extrêmes. Malgré cela, je persiste à affirmer que l’homme d’aujourd’hui pressant le mystère mais certainement autrement : peut-être dans le froid de la solitude ; peut-être dans une tendresse désespérée qui fait que dans son regard il y a autant d’amour que de chagrin.  Si crise spirituelle il y a, on peut définir cela comme une descente dans la mort et l’enfer. Pour le chrétien, c’est là précisément que le Christ triomphe, lui qui pénètre sans cesse tout seul par toutes les jointures de la création, lui le Ressuscité qui se laisse ensevelir jusque dans le plus profond de l’homme athée, encore enseveli dans la mort de Dieu. Il y a pourtant beaucoup de signes de guérison dans le monde qui nous entoure. A nous de savoir les reconnaître et les déchiffrer. Cela n’est possible que par la pratique d’une authentique prière car c’est elle qui nous purifie de tous les obstacles qui se dressent devant les yeux de notre cœur puisque que c’est elle qui nous fait saisir en vérité l’intensité de notre être. Autrement dit, ou bien nous sommes totalement envahis par la prière et nous obtenons tout ou au contraire nous accordons une bonne place à la prière tout en prenant bien soin de nous réserver égoïstement une petite part personnelle, qui nous empêche d’acquérir la certitude que l’homme tout entier est illuminé par la victoire du Christ sur l’enfer et la mort.La certitude que le salut communiqué à l’homme, quel qu’il soit, le concerne tout entier, son corps comme son âme et son esprit.

Frères et Sœurs bien-aimés,

Levons avec joie et confiance les yeux vers Jésus notre divin Sauveur tout en nous disant que nous n’attendons, nous ne demandons et nous ne recevons rien d’autre que sa compassion, sa miséricorde et sa grâce. Alors nous serons remplis de Dieu, nous vivrons notre vie en Christ sous la conduite et la douceur de son Esprit Saint. Dans tous les cas, restons auprès du Médecin qui est le Christ et lui il nous comblera de son amour par tout moyen qui découle de sa providence et que nous ignorons.

Christ est ressuscité. A lui tout honneur et toute gloire pour les siècles des siècles.

Tallinn, en ce jour du 5 mai 2024 de la Pâque du Seigneur.

+ STEPHANOS, Métropolite de Tallinn et de toute l’Estonie,

                                            Président du Saint Synode.