Saint Serge de Radonège
Viimati muudetud: 24.03.2015
La Vie du Saint Père Théophore Serge de Radonège, Thaumaturge et Protecteur de la Russie
Saint Serge naquit en 1313 à Rostov. Ses parents, Cyrille et Marie, lui donnèrent au baptème le nom de Barthélémy. Dès le sein de sa mère, Dieu laissa prévoir la gloire future de son serviteur. C’est ainsi qu’une fois, au cours de la liturgie avant la lecture de l’Evangile, l’enfant se mit à crier dans le sein de sa mère, si fort que sa voix fut entendue par d’autres. Au moment de l’hymne des chérubins, la voix de l’enfant se mit encore à retentir, ce qui effraya Marie. Lorsque le prêtre prononça l’ecphonèse : «Ce qui est saint aux saints !», l’enfant poussa un cri pour la troisième fois, et sa mère commença à pleurer. Ceux qui étaient présents à la liturgie souhaitaient voir l’enfant; mais la mère fut contrainte de dire qu’il criait non pas sur ses bras, mais dans son sein. Après cet événement inhabituel, Marie, pendant toute la période de sa grossesse, ne mangeait ni viande ni lait ni poisson; elle se nourrissait exclusivement de pain et d’eau, et vaquait à la prière. Lorsqu’il eut sept ans, on envoya l’enfant ètudier. Or, contrairement à ses frères Etienne et Pierre qui apprenaient bien, Barthélémy éprouvait des difficultés. Le maître le punissait, ses camarades se moquaient de lui, ses parents le réprimandaient; mais Barthélémy, malgré toute sa bonne volonté, ne parvenait pas à apprendre. C’est alors que se produisit le même phénomène qu’avec Saül. Un jour, alors que son père l’avait envoyé au champ chercher des chevaux, Barthélémy aperçut un moine âgé sous un chêne, qui priait en versant des larmes. Le jeune garçon s’approcha doucement, attendant la fin de la prière du staretz, qui lui dit: «Que te faut-il, mon enfant?» Barthélémy répondit: «Je ne puis apprendre malgré mes efforts. Prie Dieu pour moi, saint père, pour que je puisse apprendre les lettres». Le staretz, en prononçant une prière, donna un morceau de prosphore à l’enfant et lui dit: «Ne t’afflige point. A partir de ce jour, le Seigneur te donnera la compréhension des lettres!» Alors que le staretz voulait sortir, Barthélémy tomba à ses pieds et lui demanda de visiter la maison de ses parents. Il ajouta: «Mes parents aiment fort les personnes semblables à toi, Père». L’Ancien, en souriant, se rendit à la maison des parents de l’enfant, qui le reçurent avec grande considération. Ils le prièrent de partager leur repas, puis le staretz entra dans la chapelle familiale. Prenant l’enfant avec lui, le vieux moine lui ordonna de lire les heures. Cependant, Barthélémy, troublé, répondit qu’il ne pouvait pas lire. Le staretz réintima l’ordre, et l’enfant, ayant pris sa bénédiction, commença à lire le psautier correctement et distinctement, à l’étonnement général. A table, les parents racontèrent au moine ce qui s’était produit à l’église quand l’enfant était encore dans le sein de sa mère. Le staretz, avant de se séparer d’eux, dit ces paroles énigmatiques: «Cet enfant va devenir la demeure de la Sainte Trinité, et amènera une multitude à la compréhension de Sa volonté». Après cela, Barthélémy commença à fréquenter avec ardeur l’église et à lire la sainte Ecriture. Après un certain temps, alors qu’il était âgé de douze ans, il se mit à observer une stricte tempérance, s’abstenant de toute nourriture le mercredi et le vendredi et se contentant, les autres jours, de pain sec et d’eau. En raison de certains malheurs qui le frappèrent à Rostov, le père de Barthélémy, Cyrille, partit à Radonège avec sa famille. Là, Barthélémy continua son ascèse. Alors que ses deux frères s’étaient mariés, il demanda à ses parents la permission de s’engager dans la vie monastique. Ceux-ci le prièrent d’ajourner son désir jusqu’à leur mort. Cependant, peu de temps après, ils entrèrent eux-mêmes au monastère et décédèrent bientôt. Pendant quarante jours, Barthélémy pria sur leur tombe, nourrit les pauvres et fit servir des offices de requiem. Ensuite, il fit don de ses biens à son frère cadet Pierre et décida d’accomplir son désir. Son frère aîné Etienne, dont la femme était décédée, effectua sa profession monastique au monastère de Khotov, où ses parents étaient enterrés. Barthélémy, qui souhaitait une profonde solitude, convainquit Etienne de rechercher un endroit qui conviendrait mieux à la vie ascétique. Ils cheminèrent longtemps dans les forêts, puis trouvèrent un endroit approvisionné en eau et éloigné des chemins battus, à dix verstes de Radonège et de Khotov. Ils bâtirent une cellule avec une petite église. Le frère cadet, obéissant à l’aîné, demanda en quel nom serait construite l’église. Barthélémy, se rappelant les paroles du staretz, répondit qu’il convenait de dédier l’église à la Sainte Trinité. Le frère cadet dit alors que telle était aussi sa pensée. L’église fut consacrée avec la bénédiction du métropolite Théognoste. Ayant demandé à l’higoumène Métrophane de venir, Barthélémy reçut la tonsure monastique avec le nom de Serge. Il avait alors vingt-quatre ans (1337). Etienne, quant à lui, parti peu de temps après au monastère de la Theophanie à Moscou.
Et voici que Serge se trouva seul dans cette forêt, où les loups hurlaient près de sa cellule. Les ours aussi s’approchaient du lieu où vivait le saint. Une fois, Serge s’aperçut qu’un ours n’était pas tant féroce qu’affammé, et il commença à éprouver de la pitié pour cet animal, puis lui donna de la nourriture. Le fauve s’éprit du père et vint souvent recevoir de lui sa pitance. Le saint la lui donnait à chaque fois, partageait son dernier morceau de pain avec cet animal, et allait même jusqu’à se priver de nourriture pour lui. Saint Serge resta seul pendant trois ans jusqu’à ce que des zélateurs de la piété commencent à lui demander de vivre sous sa direction spirituelle. Peu à peu, douze fréres se rasemblèrent, et chacun d’entre eux construisit sa propre cellule. L’office de minuit, les matines, les heures, les vêpres et les complies étaient quotidiennement célébrées à l’église. Pour la célébration de la liturgie, les frères appelaient un prêtre de l’extérieur, car il n’y en avait pas encore parmi eux. Enfin, l’higoumène Métrophane, qui avait tonsuré Serge, vint vivre avec eux. Mais, peu de temps après, cet ancien mourut. Quant à Serge, il ne voulait pas, par humilité, devenir higoumène. Les frères se réunirent alors, vinrent voir le saint et lui dirent: «Père, nous ne pouvons vivre sans higoumène, et nous souhaitons que ce soit toi qui remplisses cette fonction. Ainsi, lorsque nous viendrons te révéler nos péchés, nous recevrons des enseignements et l’absolution. Il convient également que la liturgie soit célébrée et que nous recevions les saints Mystères de tes pures mains». Cependant Serge refusa et, quelques jours après, la communauté se réunit de nouveau chez le saint, en le priant d’accepter la charge d’higoumène. «Il ne m’appartient pas d’accomplir le ministère angélique; il m’appartient de pleurer mes péchés», répondit-il. Les frères pleurèrent et dirent enfin: «Si tu ne veux pas prendre soin de nos âmes, nous serons contraints de quitter ce lieu, nous errerons alors comme des brebis égarées, et tu devras en répondre devant Dieu.» «Je préfère me soumettre que de commander, dit Serge; mais, craignant le jugement de Dieu, je laisse ce problème à la volonté du Seigneur». Prenant avec lui deux des moines les plus âgés, il se rendit à Péréïaslavl, chez Athanase, l’évêque de Volynie, auquel S. Alexis, alors à Constantinople, avait remis les affaires du diocèse metropolitain.
En 1354, Serge fut ordonné prêtre et élevé au rang d’higoumène par l’évêque Athanase. Il célébrait quotidiennement la sainte liturgie, et arrivait le premier à l’église pour chaque office. Il fabriquait lui-même les cierges et les prosphores, ne permettant jamais à quiconque de participer à cette dernière tâche. Pendant trois ans, le nombre des moines resta identique, le premier qui fit augmenter ce nombre fut l’archimandrite Simon de Smolensk, qui préférait obéir à S. Serge plutôt que commander ailleurs.
Le soir après les complies, et sauf en cas de besoin urgent, nul n’avait l’autorisation de se rendre dans la cellule d’un autre moine. Car les heures de la nuit devaient être réservées à Dieu seul. Le reste du temps, ils restaient dans le silence à alterner la prière et le travail manuel. A la fin de la prière que les frères devaient accomplir dans leur cellule, le saint faisait secrètement le tour de celles-ci. S’il entendait de vaines conversations ou des rires, il frappait à la fenêtre pour les faire cesser et s’en allait tout triste. Le matin, il réunissait les fautifs, et «de loin», à l’aide de paraboles et sur un ton humble et doux, il les instruisait. Il n’employait une sévérité toute mesurée que pour ceux qui refusaient de faire pénitence et persistaient dans leurs fautes. Il aimait tant la pauvreté qu’il institua comme règle stricte de ne jamais faire de quête au profit du monastère: quels que soient ses besoins. Le dépouillement était extrême dans la communauté: On s’éclairait avec des tisons pour l’office, et les livres étaient faits en écorce de bouleau. Un jour, le monastère se trouva réduit à une si extrême misère qu’on ne pouvait plus y trouver ni pain ni eau. Après avoir passé trois jours sans nourriture, Serge se rendit chez le frère Daniel et lui dit: «J’ai entendu que tu voudrais construire une entrée devant ta cellule. Je te la construirai afin que mes mains ne restent pas oisives. Cela ne te coûtera pas cher, je veux du pain avarié et tu en as.» Daniel lui apporta donc des morceaux de pain moisis qu’il avait chez lui. «Garde-les, lui dit le saint, jusqu’à la neuvième heure; je ne prends pas de salaire avant d’avoir travaillé». Ayant achevé son travail, Serge pria, bénit le pain, en mangea, puis but de l’eau, ce qui constitua son repas. En raison de l’absence de nourriture, les frères commencèrent à manifester leur mécontentement: «Nous mourons de faim», dirent les faibles, «et tu ne permets pas de demander l’aumône. Demain, nous partirons d’ici, chacun de son côté, et nous ne reviendrons plus ! » Le saint les persuada alors de ne pas affaiblir leur espoir en Dieu. «Je crois, dit-il, que Dieu ne délaissera pas les habitants de ce lieu». A ce moment, on entendit quelq’un frapper à la porte. Le portier vit que l’on avait apporté beaucoup de pains. Il accourut tout joyeux, et dit à l’higoumène: «Père, on nous a apporté beaucoup de pains. Donne-nous ta bénédiction afin que nous les prenions! » Le saint ordonna de laisser entrer les bienfaiteurs, et convia tous les frères à table, ayant au préalable célébré un office d’action de grâces. «Où sont ceux qui nous ont apportè ces dons ?» demanda-t-il. «Nous les avons invites à table et leur avons demandé qui les avait envoyés», répondit le moine, «et ils nous dirent que c’était quelqu’un qui aime le Christ, qui les avait envoyés; mais que, ayant une autre tâche accomplir, ils devaient partir».
Une autre fois, le saint, tard dans la soirée, priait pour les frères de son monastère. Soudain, il entendit une voix lui dire: «Serge! » Ayant terminé une prière, il ouvrit la fenêtre et aperçut une lumière inhabituelle qui descendait du ciel, et la voix continua: «Serge ! Le Seigneur a entendu la prière pour tes enfants; vois quelle multitude s’est rassemblée autour de toi au nom de la Sainte Trinité». Alors, le saint vit une multitude d’oiseaux merveilleux, volant non seulement dans le monastère, mais également tout autour. «Ainsi, poursuivit la voix, se multipliera le nombre de tes disciples et il ne te manquera point de successeurs pour marcher sur tes traces».
Peu de temps après, le patriarche Philothée’ fit parvenir au saint une croix et encore d’autres présents avec une lettre, dont voici le contenu : «Par la Miséricorde Divine, l’archevêque de Constantinople, patriarche œcuménique, Philothée, à Serge, fils dans le Saint-Esprit et concélébrant de notre humble personne. Que la grâce, la paix et notre bénédiction soient avec vous tous! Nous avons entendu parler de ta vie vertueuse, nous l’approuvons, et nous en glorifions Dieu. Mais il te manque une chose: la vie commune (cénobitique). Tu sais, Père très semblable au Christ, que le parent de Dieu, le prophète David, qui saisissait tout par son esprit, loua la vie commune. «Qu’y a-t-il de meilleur et de plus beau pour des frères gue de vivre ensemble» ? (Ps 132). Pour cela, je vais vous donner un conseil utile: instituez le cénobitisme. Que la miséricorde de Dieu et notre bénédiction soient avec vous! » Suivant le conseil du patriarche, le saint, avec la bénédiction du métropolite Alexis, introduisit la vie commune intégrale dans son monastère. Il construisit les bâtiments nécessaires, définit les devoirs propres à cette vie, et ordonna que toute chose soit commune, interdisant d’avoir sa propriété ou d’appeler quelque chose «sien». Le nombre des disciples s’accrut alors et l’abondance régna au monastère. On introduisit l’hospitalité, on nourrit les pauvres et on donna l’aumône à ceux qui le demandaient. Saint Serge s’était soumis à ce conseil du patriarche par esprit d’obéissance. Bien qu’il demeurât amant de la solitude, il accepta d’assumer cette forme plus rigide de direction, sans cesser pourtant d’être un père et un éducateur plutôt qu’un administrateur. Mais il devait bientôt subir de cruelles épreuves. Un samedi, le saint se trouvait dans le sanctuaire, célébrant les vêpres. Son frère, revenu au monastère, demanda au canonarque: «Qui t’a donné ce livre ?» «L’higoumène», répondit celui-ci. «Qui est higoumène ici ?» répondit à son tour Etienne, avec colère. «N’ai-je pas fondé ce lieu en premier ?» A ceci, il ajouta de violentes paroles. Le saint entendait tout cela dans le sanctuaire, et il comprit que cette manifestation de mécontentement était dûe en fait au nouvel ordre qui régnait dans le monastère. Mécontents du cénobitisme, certains quittèrent en secret le monastère, et d’autres souhaitaient ne plus avoir Serge pour higoumène. Le saint, laissant ceux qui voulaient vivre selon leur volonté face à leur conscience, ne rentra même pas dans sa cellule, mais s’éloigna du monastère. Les meilleurs moines étaient inquiets, mais pensaient encore que Serge reviendrait. Toutefois, leur attente fut déçue. Le saint s’installa à Kirjatch. Sur la demande de certains, saint Alexis dépêcha une délégation auprès de saint Serge,afin qu’il revînt au monastère où il était si utile. Mais saint Alexis, sentant sa mort prochaine, souhaitait trouver en la personne de Serge son successeur. Il le fit venir chez, lui fit cadeau de sa croix épiscopale. Mais saint Serge, par humilité, la refusa en disant: «Pardonne-moi, Seigneur, mais depuis mon enfance je n’ai jamais porté d’or et maintenant, je souhaite d’autant plus rester dans le dépouillement». «Je le sais, bien-aimé, mais accepte par obéissance!» répondit Alexis. Ce faisant, il lui passa la croix autour du cou et lui annonça qu’il le désignait comme son successeur. «Pardonne-moi, vénéré pasteur, mais tu veux me charger d’un fardeau qui dépasse mes forces. Tu ne trouveras pas en moi ce que tu cherches. Je suis le plus pécheur et le pire de tous.»
Lorsque les hordes tatares déferlèrent sur la terre russe, et alors que la population était effrayée, le grand Duc Dimitri Ioannovitch, qui avait une grande foi en saint Serge, lui demanda s’il devait entrer en guerre contre les impies Tatares. Le saint bénit le grand Duc pour entrer en guerre et lui dit: «Avec l’aide de Dieu, tu seras victorieux et tu sortiras de la bataille sain et sauf et couvert d’honneurs.». Au moment de la bataille de Koulikovo*, le saint était en prière avec ses frères et parlait du déroulement heureux des combats. Il citait même les noms de ceux qui tombaient, faisant une prière pour eux. Conformément à la prédiction de saint Serge, le grand Duc remporta la célèbre victoire de Koulikovo, qui constituait le début de la délivrance du joug tatare.
Une nuit, alors que saint Serge chantait l’Acathiste à la Mère de Dieu et lui adressait de ferventes prières pour le monastère devant son icône, il s’interrompit un instant pour dire à son disciple Michée: «Sois vigilant, mon enfant, car nous allons recevoir une visite miraculeuse!» A peine avait-il prononcé ces paroles qu’il entendit une voix: «La Très Pure arrive! » Il se précipita à l’entrée de sa cellule et, soudain, une lumière inhabituelle l’entoura, plus éclatante encore que le soleil. Il vit la Très Sainte Mère de Dieu, accompagnée des Apôtres Pierre et Jean, rayonnante d’une gloire indescriptible. Le saint se prosterna à terre, mais la Mère de Dieu le toucha de sa main et dit: «Ne crains point, mon élu! Je suis venue te visiter, car j’ai entendu ta prière pour tes disciples et pour ce lieu. Dorénavant je ne quitterai pas ton monastère, durant ta vie comme après ta mort, et je le protégerai». Après cela, le saint resta sans sommeil toute la nuit, méditant avec piété sur la miséricorde céleste.
Six mois avant son trépas, le saint, appelant sa communauté, la recommanda à Nicon, et se consacra lui-même à la solitude et à la prière. En septembre, il pressentit la maladie, appela de nouveau les frères et leur donna à tous ses dernières instructions. Il mourut le 25 septembre 1391, à l’âge de 78 ans.
* Bataille décisive pour la Russie, que l’on peut comparer à la bataille de Poitiers en France.
Macaire, moine de Simonos Petras
« Le Synaxaire. Vies des Saints de l’Eglise Orthodoxe »
Editions « To Perivoli tis Panaghias », © S. M. Simonos Petras, Mont Athos