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DIMANCHE DE LA SAINTE PENTECOTE

Chers Frères et Sœurs en Christ,

Ce dimanche, dimanche de la Pentecôte,  est un jour immense. L’Esprit Saint, le Consolateur, descend sur les Disciples et Apôtres du Christ dans la chambre haute, où ils séjournaient à Jérusalem en compagnie de Marie la Sainte Mère de Jésus et d’autres,  dans l’attente de Sa venue.

Et  lorsque vint ce jour, lorsque  soudain retentit du ciel un fracas semblable à celui d’une bourrasque de vent, lorsque ce bruit remplit toute la maison où les disciples et les Apôtres étaient assis, lorsque l’Esprit Saint vint se poser sur chacun d’eux sous forme de langues de feu, alors ils furent saisis de sa présence   (Actes 2,1-4), ils  furent remplis de sagesse et de force, ils sortirent du lieu où ils se cachaient et ils commencèrent  à haranguer la foule qui, dans sa stupeur, ne savait plus que penser tandis qu’elle les entendait proclamer les merveilles de Dieu dans chacune des langues étrangères présentes.

Dimanche donc de la Pentecôte ! Un miracle immense pour toute la création. Le don de l’Esprit Saint a toujours été la plus grande promesse du Nouveau Testament et voici qu’elle se réalise aujourd’hui même. L’Esprit Saint descend sur les Disciples et les Apôtres et fait d’eux des prédicateurs inégalés et des pêcheurs d’hommes.

Ils s’en allèrent  donc de par le monde entier ; ils réduisirent au silence la très sage et très savante Athènes ; ils mirent à genoux la très puissante et très conquérante Rome ; ils portèrent la Bonne Nouvelle de l’Evangile jusqu’aux extrémités les plus extrêmes de la terre. Et pour finir, la  Nef non construite par des mains d’hommes qu’est l’Eglise déploya ses voiles et prit son élan  sur l’étendue de la mer de nos vies pour sauver les hommes, soutenue de manière constante et ininterrompue jusqu’à la fin des temps par la Grâce de l’Esprit Saint, son souffle, son guide et son protecteur.

L’évangile de Saint Jean que nous lisons ce matin au cours de la Divine Liturgie se rapporte à la fête des Tentes à Jérusalem. Il nous décrit tout particulièrement ce qu’il advint le dernier et huitième jour des festivités, auxquelles avait pris part aussi Jésus.

Rappelons très brièvement que cette fête est l’une des plus importantes du judaïsme. Elle dure une semaine. Elle est célébrée partout dans le monde. Elle rappelle la réception de la Loi sur le Mont Sinaï par Moïse,  la sortie d’Egypte et plus précisément les quarante années au cours desquelles les Hébreux vécurent dans le désert en route vers la Terre Sainte, guidés par Moïse. Dans le désert ils s’abritaient dans des tentes ou des huttes provisoires. D’où le rappel de cet événement majeur de l’histoire du Peuple juif.  Plus tard s’y ajouta la célébration de la fin des récoltes, durant laquelle, là aussi, on dressait dans les vignes des petites cabanes et des huttes de branchages où l’on y résidait le temps des vendanges. C’est pourquoi le nom de « fête des Tentes ».

Si, de nos jours, la fête des Tentes est très populaire et très appréciée, c’était aussi le cas dans l’Antiquité. Elle était peut-être honorée comme la fête la plus importante de toutes et pour cette raison la Bible en  général et le passage du jour de Saint Jean en particulier  l’appellent « la fête » sans plus de précision. C’est aussi ce que prétend l’historien juif Flavius Josèphe qui vécut  au 1er siècle de notre ère et qui  la considère comme « la fête la plus sainte et la plus grande » (in Antiquités juives 8,100 ).

La coutume voulait  que le dernier jour, le peuple se rendait en très grand nombre à la piscine de Siloam pour  y puiser abondamment de l’eau – des quantités et des quantités d’eau – dans une atmosphère de très grande liesse. Selon les dires d’un historien, « si quelqu’un désire voir ce qu’est la vraie joie, il suffit qu’il s’y trouve à ce moment-là ; qu’il expérimente en lui ce qu’est la joie de la joie » !

Avec le temps, à cette manifestation de joie s’ajouta peu à peu une autre dimension. Elle devint comme l’expression d’un grand défi en attente, le défi de la venue de l’Esprit Saint. Et c’est cela que les Juifs signifiaient sans doute en puisant une immense quantité d’eau, que les prêtres et le peuple déversaient sur l’Autel des Holocaustes, car l’eau est un don de Dieu, un symbole  mystérieux et indispensable pour la sauvegarde de la vie sur terre.

Jésus choisit donc ce dernier jour de la fête, pour s’adresser debout à la foule. « Si quelqu’un a soif, qu’il vienne à moi et qu’il boive. Celui qui croit en moi, des fleuves d’eau vive couleront de son sein, comme dit l’Ecriture » (7,37-38). Le sens de ces paroles est clair. D’une part, l’effusion du Saint Esprit est conditionnée par la foi en Jésus. D’autre part, le Saint-Esprit que devaient recevoir ceux qui croient en Lui, sera donné quand la présence visible des Jésus aura été retirée de ce monde. Or à ce moment-là « l’Esprit Saint n’avait pas encore été donné  parce que Jésus n’avait pas encore été glorifié » (7, 39), autrement dit qu’Il n’était pas encore monté au ciel.

L’être humain a soif de Dieu. Il a soif de  vie éternelle, il a soif d’amour, il a soif de bonheur, il a soif de bonté, il a soif de tous ces biens que Dieu lui avait confiés dans le jardin de l’Eden. Mais après le chute originelle et son renvoi du paradis, l’homme remit son destin dans d’autres mains, dans celles de l’erreur, du mensonge et de l‘oubli. Il s’enfonça ainsi dans une épaisse nuit, de laquelle  seul il ne pouvait trouver aucune issue pour se libérer de l‘esclavage mortel du Malin.

Pour cette raison le Christ vint sur terre. Par sa passion, sa mort sur la croix et sa Résurrection, par le fait qu’il est allé au bout de son amour pour l’homme, Il lui a fait don de la vie éternelle. Le Christ est pour chacun son espérance parce que c’est de Lui, glorifié dans sa mort vivifiante, que va se répandre sur le monde l’Esprit Seigneur, l’Esprit de Vérité, le Donateur de Vie. Nous ne pouvons pas vivre avec Jésus ressuscité si nous ne commençons pas par l’Esprit Saint. Le don de l’Esprit est au commencement de tout, il contient tous les dons, il est Lui-même le don.

« Je suis, dit le Christ à la fin de notre lecture de Jean, la lumière du monde ; celui qui me suit ne marchera pas dans les ténèbres, mais il aura la lumière de la vie » (8,12). Mais pour que nos yeux s’ouvrent à cette lumière, Il nous faut un « complice » de notre cœur qui nous enseignera le Christ en nous.

Et ce complice, c’est bien l’Esprit Saint,  Source de la vie que rien ni personne ne peuvent nous ravir ; Lui, le Consolateur, dont la présence nous anime de la vraie joie de vivre à l’intérieur même de toutes nos blessures ; Lui, le trésor de toute grâce qui nous apprend à vivre dans l’authentique action de grâce ; Lui qui fait tomber tous les barrages, qui supprime toutes les lignes de démarcation qui sont la suspicion, la susceptibilité, la division, tout ce qui fait le monde de la mort en nous ; Lui enfin qui dilate nos cœurs dans la communion parce qu’Il est réellement l’amour du Père, réellement la source qui jaillit du côté du Christ transpercé par son amour.

Chers Frères et Sœurs en Christ,

Sans l’Esprit Saint, Jésus, et tout ce qu’Il a fait pour nous, peut nous émerveiller mais n’est qu’un souvenir.

Sans l’Esprit Saint, l’Evangile est un très beau programme mais il reste un programme, extérieur à notre conscience.

Sans l’Esprit Saint, notre vie n’est que dispersion extérieure ; nous ne sommes alors que des machines plus ou moins bien montées, en un mot des robots mais non l’image transparente de notre Dieu.

Sans l’Esprit Saint enfin, notre relation à autrui – et notre existence est faite de relations – ressemble à celle du monde de Babel où, même si l’on parle la même langue, règne la division, l’incommunication.

Tout particulièrement ce jour où nous commémorons le saint et grand événement de la Pentecôte, levons les mains au ciel et demandons à Dieu qu’Il nous envoie son Esprit Saint. Et qu’il en soit ainsi pour nous tous ensemble et pour chacun en particulier. Amen !

 

Le 31 mai 2015 ā Tallinn